Quelles seront les caractéristiques des formateurs de demain ?
Conférence de François GALINOU à l’AFREF – jeudi 19 mars 2015 [i]
La question de ce que doit être un formateur de demain serait une de celles que se posent tous les dirigeants d’organismes de formation. Je vais la traiter depuis ma posture de praticien de la normalisation, de la certification et de la facilitation dans le domaine de la qualité de la formation professionnelle. Je dis bien praticien par opposition à chercheur. Ma posture est pragmatique. Elle est tournée vers le résultat.
Je suis Président de l’ICPF & PSI qui a fêté ses 20 ans le 17 mars dernier. L’ICPF & PSI certifie les professionnels de la formation et de la prestation de service intellectuel sur la base de normes ISO et AFNOR. En tant que facilitateur, vous pouvez comprendre consultant ou formateur, j’accompagne les organismes de formation dans leurs démarches qualité à l’obtention de la certification ISO 9001 ou 29990. Je tiens à vous dire que je pratique de manière dense et continue. Avec mon équipe, je mène environ dix-sept projets. J’accompagne par exemple l’organisme de formation EMI CFD dans le domaine de la communication, FORMIRIS dans le domaine de la formation des enseignants de l’éducation catholique ou encore, le SMA – le Service Militaire Adapté. En ce qui concerne l’ICPF & PSI, deux activités sont menées : la certification, dont je vous ai parlé, et la normalisation. L’ICPF & PSI participe, en finançant et en apportant son expertise, à la conception des normes françaises et internationales, on dit ISO, en formation professionnelle. Le sommet actuel atteint dans cette voie est l’ISO 29990. J’ai personnellement suivi ce projet depuis 2006. La norme a été publiée en 2010. J’en suis le spécialiste francophone. Je vise le titre mondial.
De cette posture, je vais traiter la question des caractéristiques des formateurs de demain en trois temps. Dans un premier temps, il s’agit de vous faire comprendre comment la normalisation et la certification sont conduites en formation professionnelle. Dans un deuxième temps, je vous présenterai la vision de l’ICPF & PSI du formateur professionnel d’aujourd’hui. Le troisième temps sera consacré au formateur de demain. Vous avez constaté que je n’ai pas encore prononcé le mot « compétence ». Je vais commencer par cette notion. Le suspense est donc levé. Animé par l’espoir de voir le thème central de la matinée abordé, Denis Bismuth[ii]respire.[1]
Premier temps – QU’EST-CE QUI PEUT ETRE NORMALISE ET CERTIFIE ?
Du point de vue du normalisateur, ISO, comme du certificateur de formateurs, la certification tierce partie de la compétence n’existe pas. Pourquoi ? Parce que la compétence n’est pas un objet de normalisation ou un champ de normalisation.
Nous avons trois types d’entités qui peuvent être certifiés. Le premier type concerne les organisations ou les systèmes de management avec la norme ISO 9001 et des normes qui aujourd’hui utilisent l’ISO 9001 comme modèle, « méta-modèle » pour être précis. Il y a par exemple l’ISO 27001 pour les systèmes d’information. L’ISO 29990 qui permet de caractériser et de certifier les organismes de formation. Le deuxième type concerne les personnes. Nous avons, en France, les diagnostiqueurs immobiliers. Ils vous délivrent un certificat qui vous autorise à vendre votre maison. C’est le fait qu’il ait la certification de la personne qui entraîne la validité du document produit. L’ICPF & PSI certifie les formateurs. Dans certains secteurs d’activité, certifier la personne, le professionnel, permet d’obtenir la satisfaction des exigences des clients, des consommateurs ou des parties prenantes. Nous verrons plus loin comment faire. Le troisième type concerne les produits considérés comme des entités tangibles. C’est l’immense majorité des normes. Dans la famille des produits, nous avons les services et en sous-famille, les services intellectuels. Voilà le point de vue d’un normalisateur ou d’un certificateur. Les services intellectuels sont un terrain vierge, inexploré et très lointain. Je ne résiste pas, emporté par ma passion, à vous parler de la qualité en prestation de service intellectuel. Elle dépend en partie du stagiaire pour faire court. De la même manière que la qualité perçue d’un service de transport dépend, partiellement, des passagers contrairement à celle d’un produit.
Je veux maintenant vous faire comprendre qu’il est possible de porter un projet de norme ISO à condition de s’engager à réaliser un document qui entrera dans une de ces trois familles et d’être prêt à investir. L’ISO ou l’AFNOR ne font que la conduite du projet et la publication. Les parties intéressées financent les travaux et envoient les « experts » qui vont élaborer le contenu de la norme. Pour finir ce premier point sur la normalisation, elle consiste donc à indiquer des caractéristiques intrinsèques à l’entité. Dans le cas des normes permettant la certification de personne physique, que fait-on ? Est-ce qu’on parle de compétence ?
Avant de répondre, je fais un point sur la certification. Elle consiste à faire vérifier la conformité d’une entité à un référentiel. Celui-ci est conçu et élaboré par un organisme de certification sur la base de normes ISO ou nationales. S’il s’agit d’un référentiel sans ces normes, on parle de « label ». L’idéal en certification est la certification tierce partie, c’est-à-dire, indépendante. La certification seconde partie ou de première partie auraient moins de valeur. La seconde partie est menée par une partie prenante. La première partie, c’est l’entité elle-même qui se déclare conforme. Il y a un niveau ultime, au-delà de l’idéal, la certification tierce partie accréditée. C’est-à-dire qu’un organisme contrôle que le certificateur mène son activité conformément à des normes de certification. L’Etat peut intervenir au niveau de l’accréditation ou de la certification en les rendant obligatoires. Il peut également intervenir, c’est le cas pour la formation, en participant directement ou indirectement, à la normalisation. Dans le cas de l’eau potable, sa qualité est contrôlée par des laboratoires, qui sont eux-mêmes contrôlés par le COFRAC, l’accréditeur Français. L’Etat intervient en rendant la certification accréditée obligatoire et en interdisant la distribution de l’eau si sa qualité n’est pas contrôlée ou non certifiée. Conséquence, si le laboratoire perd son accréditation, la distribution de l’eau est coupée. Il est interdit de distribuer de l’eau si sa qualité n’est pas contrôlée. Notez qu’en tant que consommateur nous n’y voyons absolument aucun inconvénient. Cela nous semble « normal ».
Deuxième temps – QUELLES SONT LES CARACTERISTIQUES DU FORMATEUR SELON L’ICPF & PSI
Maintenant que vous avez compris le système, je vous explique maintenant comment l’ICPF & PSI certifie les professionnels de la formation et du conseil. Ce faisant, un ensemble de caractéristiques est valorisé. L’avantage est que ces caractéristiques peuvent faire l’objet d’un audit, c’est-à-dire, que le tiers qu’est l’ICPF & PSI vérifie la conformité à un référentiel. Celui-ci est basé sur les normes ISO 9001, 29990 et AFNOR de formation professionnelle. La norme ISO 9001 nous donne l’esprit général et les fondamentaux de la démarche qualité. La norme ISO 29990, la définition du facilitateur, l’acteur clef et générique de la formation, défini comme les personnes qui accompagnent un stagiaire dans son apprentissage. Elle décrit également les cinq processus composant une activité de formation. Dans la norme, c’est un point important, on parle de « learning » en anglais et non de « training ». C’est-à-dire qu’on considère que les activités sont orientées sur la facilitation de l’apprentissage de l’apprenant jusqu’à l’application de ce qui a été appris au poste de travail. Cette facilitation se décline en cinq processus : la détermination du besoin, la conception, la fourniture, le suivi du service et l’évaluation. Une organisation qui mène ces cinq activités est un organisme de formation. Nous utilisons également les normes AFNOR relatives à la formation professionnelle. Les définitions de fonctions contenues notamment dans le X50-769 comme la définition des acteurs suivants : formateur, consultant formateur, concepteur, ingénieur de formation,… Le référentiel, d’autre part, est basé sur huit critères. Et c’est là que vous allez pouvoir identifier un professionnel de la formation comme un auditeur ICPF & PSI ou un utilisateur de notre certification. Les huit critères sont : l’identité, la fonction, le secteur d’intervention, le niveau, la démarche qualité, la démarche déontologique, les preuves et résultats et les publications.
Le premier critère est l’IDENTITE au sens large. Nom, Prénom, CV, statut fiscal et social, casier judiciaire vierge. L’ICPF & PSI accorde de l’importance à l’identité de la personne physique. C’est pour rendre compte de l’intuitu personae propre à ce métier. En revanche, nous intégrons le fait que le statut fiscal et social peut changer en cours de parcours et ne remet pas en cause la certification attachée à la personne.
Le deuxième critère est la FONCTION. Il s’agit de choisir celle qui est réellement exercée et non celle qui est fantasmée. La démarche satisfait énormément ceux qui font réellement de la conception d’action de formation par exemple.
Le troisième critère est la DURÉE dans la fonction. Depuis combien de temps, quel que soit le statut, l’animation de formation est-elle pratiquée ? Si vous n’avez pas de pratique, vous ne pouvez pas obtenir la certification. Trois niveaux sont proposés. AGREE pour les moins de cinq ans de pratique. CONFIRME pour les plus de cinq ans. EXPERT pour les plus de dix ans.
Le quatrième critère est le SECTEUR D’INTERVENTION. Il s’agit des thèmes sur lesquels le professionnel intervient comme le management par exemple. Certains postulants demandent à être certifié sur un secteur d’intervention avec une mention du secteur d’activité dans lequel s’exercerait leur compétence. Par exemple, nous avons des formateurs en vente dans le secteur pharmaceutique. Le professionnel pense, par-là, répondre à une attente de ces clients. Un formateur qui pratique pendant des années des actions de formation avec des évaluations positives a forcément des « compétences ».
Ces quatre premiers critères ne contredisent pas le « bon sens » ou le « sens pratique » de la formation. Les professionnels du recrutement confirment que le critère essentiel est l’expérience dans la fonction et le secteur. Tous ceux qui pratiquent la formation ou managent des formateurs savent qu’il faut « connaître son formateur ». Que le baptême du feu de la pratique ou de l’expérience est sans appel pour sanctionner la «compétence » de ce dernier. Un formateur incompétent se fait rejeter par les apprenants de manière durable et répété. Il finit par s’auto-exclure ou n’est plus sollicité. Il reste qu’un formateur compétent peut aussi être rejeté, ponctuellement, pour des facteurs exogènes d’organisation inadaptée ou de contexte… Une détermination du besoin, réalisée en amont, erronée par exemple. A partir du cinquième point, l’ICPF & PSI va plus loin que le « bon sens » et les idées reçues sur le management de la formation.
En effet, le cinquième critère est la formulation de l’ENGAGEMENT QUALITÉ. A l’image de l’engagement qualité de l’ISO 9001, il est exigé un document d’une page minimum. L’exercice est passionnant à réaliser avec des formateurs expérimentés pour leur faire exprimer leur politique et leur stratégie. C’est très enrichissant pour eux comme pour les formateurs qui les accompagnent. Les premiers se disent qu’ils vont pouvoir le faire comprendre a priori à leurs clients. Les autres voient qu’ils peuvent beaucoup apporter.
Le sixième critère est la DÉONTOLOGIE. Le formateur indique sa charte. Ce qu’il s’engage à être et à faire, comme respecter systématiquement la confidentialité.
Le septième critère relève des PREUVES d’activité et de résultats comme les attestations de présence, feuilles d’évaluation, les factures, et aussi, les titres, les diplômes ou les formations suivies comme preuve de « compétence » dans un secteur d’intervention ou pour une fonction donnés. Il s’agit d’apporter des preuves tangibles.
Le huitième critère relève des PUBLICATIONS : essais, livres, articles, supports de formation conçus pertinent par rapport au secteur d’intervention. Là encore, le bon sens prescrit qu’avoir publié un livre est un gage de qualité pour le formateur.
Arrivé à ce stade, j’ai encore travaillé sur le suspense… Pour ceux qui ont de la difficulté à me suivre, je vais avancer sur la certification directe de la compétence. En préalable, il me parait nécessaire de faire un point sur l’erreur du débutant. Nous sommes tous des spécialistes d’un sujet et des débutants d’un autre. La caractéristique d’un débutant est de faire des erreurs de débutant quand il arrive dans un groupe de travail sur un sujet donné. Il propose une idée. Les autres membres se regardent entre eux et, éventuellement, l’un d’entre eux se dévoue pour lui expliquer qu’il se trompe et que ce n’est pas aussi simple. Chacun éprouve un sentiment se situant sur un continuum allant de la compassion à l’exaspération. Dans la commission de normalisation ou le comité technique ISO, il y a souvent des nouveaux. Alors en normalisation en formation professionnelle ou en certification de formateurs, il y a deux grandes erreurs de débutants.
La première consiste à dire : POURQUOI ON NE CERTIFIE PAS LA COMPETENCE ? Alors, là, un membre expérimenté répond gentiment, avec compassion, que ce n’est pas possible. C’est frustrant à entendre comme réponse. On ne sait pas faire. D’abord, parce que pour certifier une compétence il faut l’avoir et, dans cette situation, le certificateur n’est plus indépendant. Je tiens à vous dire que mon point de vue est un point de vue de praticien qui ne peut être animé très longtemps par le doute. En effet, j’ai vu souvent des groupes essayer sans aucun succès. Je ne suis pas certain que vous allez me suivre sur cette voie mais il pourrait être dit qu’une certification seconde partie d’une compétence est possible. Ainsi, un titre, un diplôme ou une attestation délivrée par une entité de formation est un certificat de seconde partie. Les certifications Microsoft sont un exemple. L’école a les professeurs qui ont les compétences. Elle peut délivrer un certificat de seconde partie. Elle en prend la responsabilité.
Il reste que, poursuivant mon raisonnement de praticien, j’arrive à la conclusion que la compétence ne peut être que dans l’homme et la femme et jamais dans l’organisation. Ce qui n’est pas la position politique de certaines organisations qui affirment que la compétence est dans l’organisation et s’opposent à la certification des personnes. Dans la perspective de la norme ISO 9001, la compétence est dans la personne, la maîtrise des processus et des principes sont constitutifs de l’essence de l’entité ou de son système de management. En bref, une organisation est ce qu’elle fait, c’est-à-dire ses processus. Elle n’a comme compétences que celles détenues par les hommes et les femmes qui l’animent. Pour vous donner un exemple, je vous citerai l’exemple des porte-avions. Il y a deux pays dans le monde en capacité de faire voler des avions militaires à partir d’un navire. Quelques pays veulent disposer à nouveau ou pour la première fois d’une telle capacité. Certains ont le bateau, les avions et les hommes. Toutefois, on sait qu’il faudra plusieurs générations de professionnels pour arriver à maîtriser des situations opérationnelles réelles. C’est très long. Et si la France avait abandonné cet ensemble de technologies, elle serait dans la même situation. Il faut donc un environnement, le porte avion, et des hommes et des femmes pour détenir la compétence.
J’en arrive à la deuxième erreur de débutant. Elle consiste à dire : vous normalisez les hommes, c’est horrible ! Cela nous prend à contrepied les certificateurs ou les normalisateurs. Le piège est de répondre directement et simplement : « mais non, je vais vous expliquer… »… Le déni augmente l’angoisse. C’est peut-être une des raisons pour laquelle la certification de personne est très peu développée et que l’ICPF & PSI est le seul organisme connu au monde à proposer la certification tierce partie de formateurs. Dans un livre que je conseille à ces débutants : La folie évaluation, Alain ABELHAUSER, Roland GORI et Marie-Jean SAURET parle du mythe de Procuste. Ce fut un brigand grec qui allongeait ses victimes sur un lit qui était toujours trop court ou trop grand. « Qu’à cela ne tienne. Procuste avait la solution. Il rabotait ou étirait ses victimes pour qu’ils soient à la norme ». C’est Thésée qui débarrasse le monde de Procuste. Inutile de dire que l’ouvrage est critique par rapport à l’évaluation et à la normalisation. En tant que professionnel, je vous dis qu’il faut se méfier des normalisateurs, des certificateurs et des consultants qualité ou tout au moins de ceux qui se proclament comme tel. Il faut s’en méfier parce que ce sont, pour la plupart, des entreprises privées mais également pour d’autres raisons. Comme le formateur ne peut être uniquement compétent en pédagogie, le « qualiticien » ne peut être compétent que sur la norme. Il doit avoir une expérience du secteur d’activité.
En ce moment, pour des raisons que tout le monde comprendra, il y a beaucoup d’experts de la qualité en formation professionnelle… Des consultants qui écrivent sur la qualité en formation professionnelle. J’éprouve alors de la compassion ou de l’exaspération. Beaucoup n’ont pas d’expérience réussie. Certains mêmes ne connaissent même pas véritablement la norme. En 2010, au moment de la parution de la norme, j’ai assisté à une conférence animée par un consultant qui lisait la norme, dans le meilleur des cas, ou en faisait une interprétation plus que libre. Je continue ma parabole pour vous affirmer que la grande majorité des consultants et des certificateurs ne sont pas opérationnels aujourd’hui sur le champ de la formation… La situation était identique au début de l’ISO 9001 dans les années 90.
Pour en revenir à la formation, je crois que ce qui a donné un sens profond à mon point de vue de praticien de la certification c’est le travail sur l’ISO 29990 où j’ai vu un humanisme des autres experts à l’œuvre. Nous avons prévu dans la norme la responsabilisation de l’organisme dans le respect des droits et des intérêts de l’apprenant comme la prise en compte de toutes ses difficultés y compris les handicaps. Une autre illumination a été l’étude des travaux de Louis Durrive sur l’expérience des normes qui parle de la « perspective de Canguilhem » [iii]. « Dans la perspective de Canguilhem, l’expérience normative est le propre du vivant humain. Tout homme veut être sujet de ses normes. Quoi qu’on imagine en cherchant à imposer des cadres contraignants, l’être humain ne se laisse pas anticiper tel un automate. Il prend position face à la norme proposée, il a un point de vue forcément singulier. » Voilà un aspect important de la déontologie de la qualité et de la certification du professionnel qui travaille dans le champ de la formation. De plus, et en réalité, l’homme ou la femme ne sont pas normalisés dans le référentiel de l’ICPF & PSI. Ce qui est normalisé c’est leur professionnalisme. C’est le terme que nous utilisons par convention. Le terme certification de personne est utilisé dans la norme ISO 17024, et dans la vulgate des professionnels de la certification, mais à l’ICPF & PSI l’emploi de ce terme est soigneusement évité quand c’est possible. Cela nous évite de parler de Procuste et de Canguilhem…
Avant d’aller plus loin, je veux vous dire que l’auditeur certifie tout de même une compétence. Grâce à la question de Didier, j’ai réfléchi, et je me suis dit qu’un auditeur de BUREAU VERITAS CERTIFICATION ou de l’ICPF & PSI ne serait pas satisfait si je lui disais qu’il ne valide pas une compétence. En fait, quand il mène un audit ISO 9001, il valide la conformité de trois ensembles :
• Le premier : la conformité de la documentation du système de management à la norme
• Le deuxième : la conformité du fonctionnement dudit système de management à la norme et à la documentation
• Le troisième : la maîtrise de la documentation et du fonctionnement du système par l’équipe
• L’auditeur valide donc la compétence à faire fonctionner le système de management en situation réelle. Notez que cette compétence est donc validée dans son « environnement » d’activité.
ET LE FORMATEUR DE DEMAIN SERA…
J’en arrive à un point clef de mon raisonnement. Quelles seront les caractéristiques du formateur de demain ? Nous avons vu quelles en étaient les caractéristiques permettant d’identifier le formateur. Est-ce que demain cela va changer ?
Là encore toujours dans mes convictions et ma technique, je vous donne ma vision du futur. Avant cela, je vais tordre le coup à un fantasme que j’ai vu sur twitter il y a peu de temps. Je veux parler du formateur. On y voit un très jeune homme et la légende nous explique ce que sera ce « formateur 2.0 » de demain [2]. Autant vous dire, que je ne crois pas du tout à ce qui me semble être un fantasme. Le formateur certifié par l’ICPF & PSI peut être jeune, mais il a de l’expérience dans sa fonction, donc il ne peut être « très » jeune. Il utilise et maîtrise la technologie, mais dans une mesure raisonnable par rapport à des apprenants qui maîtriseront également. Dans ma vision, je crois que ce qui va changer c’est la brume qui règne autour de la prestation de service intellectuel et la formation en particulier. Le formateur aujourd’hui est difficilement visible au milieu d’une masse de formateurs auto proclamés ou imposés. Des seniors se proclament ou sont incités à devenir formateur confondant et faisant confondre leur secteur d’intervention avec leur secteur d’activité. C’est le cas de la vente ou du management. Des juniors dans d’autres secteurs se déclarent ou sont déclarés spontanément compétents. C’est le cas de l’informatique ou des réseaux sociaux.
Notre système globalement favorise cette opacité et l’exercice de la formation par tous ceux qui sont désignés par un commanditaire. Heureusement, cette situation ne va pas perdurer. Le futur apprenant et les commanditaires, en effet, deviennent plus exigeants. Les deux vrais moteurs de la réforme sont, d’une part, le consensus sur l’importance de la formation, consensus général, et d’autre part, l’augmentation des exigences face à la formation et aux formateurs. Je dirai donc que le formateur de demain sera le même professionnel qu’aujourd’hui. Il aura les mêmes compétences de fond en pédagogie. Celles-ci n’évoluent pas beaucoup. Il sera compétent sur les contenus pertinents demain. Il sera simplement plus visible dans un marché où son professionnalisme sera perçu facilement parce que certifié. Ce qui va changer c’est que son professionnalisme sera plus reconnu car les critères de sa reconnaissance avec et par ses clients auront été mis en place.
CONCLUSION
En conclusion, la normalisation en formation professionnelle, et par conséquent, la certification ne peuvent concerner que l’organisation, la personne physique ou le service. La compétence ne peut être certifiée directement du fait de l’absence de normes et de l’impossibilité aujourd’hui à la certifier en tierce partie c’est-à-dire de manière indépendante par des personnes qui ne la détiendrait pas. Il y a 8 critères pour situer, évaluer et faire percevoir le professionnalisme du formateur. Les plus importants sont la durée de l’expérience réussie dans le secteur et la fonction. Ce qui va changer c’est la lucidité des futurs apprenants et la perception qu’ils auront des professionnels opérationnels. Ce qui va changer aussi c’est que nous allons certainement abandonner ce terme de formateur pour nous tourner vers un terme qui ressemblera plus à celui de facilitateur pour prendre en compte l’accompagnement dans l’apprentissage voire l’appartenance avec la prise en compte du contexte.
Toutefois, il est possible d’approcher la certification de la compétence par la certification de la personne qui la détient en l’occurrence son professionnalisme ou par la certification d’organisme qui n’est certifié que si les collaborateurs sont formés et compétents dans le système. C’est ce que l’ICPF & PSI accomplit depuis 1995 en utilisant des normes ISO et AFNOR et un référentiel basé sur huit critères : identité, fonction, secteur d’intervention, niveau, engagement qualité, engagement déontologique, preuves de résultat et publications. Il s’avère également que l’organisme de certification délivrant un certificat ISO 9001 atteste indirectement d’une compétence, c’est-à-dire la maîtrise de l’application de la norme et du référentiel de l’entreprise tel qu’il est documenté. A travers le paradigme de l’ISO 9001, il est donc possible de certifier une compétence dans une organisation donnée où les processus menés sont identifiés et documentés.
Dans le domaine de la normalisation, il apparaît que la certification de la compétence est une erreur de néophyte. La croyance dans le fait que les hommes ou les femmes sont normalisés en est une autre. En réalité, c’est le professionnalisme qui est normalisé. Quant au formateur de demain, il sera tout simplement le même mais plus visible dans un environnement plus mature grâce à l’augmentation des exigences des apprenants et de donneurs d’ordre.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
DURRIVE Louis – L’expérience des normes : formation, éducation et activité humaine – Thèse de doctorat en sciences de l’éducation – ANRT
ABLEHAUSER Alain, GORI Roland, SAURET Jean-Marie – La folie évaluation. Les nouvelles pratiques de la servitude – Mille et une nuits
Un essai que j’ai rédigé sur la qualité en formation professionnelle en France
La Montagne dans la Brume
[1] La thématique de la matinée dans laquelle s’intègre cette conférence était : « Compétences clés, bloc de compétences, certification des compétences…Quelles contradictions ? » Mon intervention faisait pendant à celle de Maryvonne SOREL.
[ii] Denis BISMUTH, consultant, organisateur de la conférence. http://www.viadeo.com/profile/0024thbatxmbtvr?nav=0&navContext=0027g7qruamith6&consultationType=27
/www.viadeo.com/profile/0024thbatxmbtvr?nav=0&navContext=0027g7qruamith6&consultationType=27